Boun Phra Vet
A partir du mois de fĂ©vrier jusquâau nouvel an lao en avril, chaque pagode de lâensemble du pays cĂ©lĂšbre successivement la fĂȘte annuelle religieuse “Phavet” pendant 3 jours.Â
Le Boun Pha Vet marque le retour au palais de Pha Vetsandone, roi lĂ©gendaire qui fut l’avant-derniĂšre incarnation du bouddha, alors chaque annĂ©e, les laotiens commĂ©morent cet Ă©vĂ©nement en faisant le rĂ©cit de la vie de PhaVet. Les bonzes en sont les principaux acteurs puisque ce seront eux qui font faire la lecture Ă tour de rĂŽle les textes sacrĂ©s de la vie de PhaVĂ©t, racontant comment celui-ci fut tentĂ© par les dĂ©mons Ă la population recueillie. Les bouddhistes lao croient que sâils cĂ©lĂšbrent ou assistent Ă la fĂȘte du Phavet, ils pourront, dans une prochaine vie, rencontrer le prochain bouddha (Pha Ariya MettaĂŻ). En effet, le rĂ©cit dâune vie antĂ©rieure du Bouddha permettrait de mieux approfondir leur connaissance et leur foi dans lâenseignement du Bouddha.
Cette fĂȘte a lieu dans tout le pays, Ă une date variable qui est dĂ©cidĂ©e en conseil par les habitants de chaque village. Dans certain village, des scĂšnes de théùtre reprĂ©sentant des scĂšnes de la vie de âPhavetâ y sont Ă©galement jouĂ© dont le supĂ©rieur des bonzes organise un tirage au sort afin de dĂ©signer les acteurs. Les bonzes et bonzillons des villages voisins sont invitĂ©s Ă la cĂ©rĂ©monie.
Dâautres vont Ă la pagode tirer au sort un papier, qui correspond Ă un passage de la vie de “Phavet”, afin de savoir ce que lâavenir lui rĂ©serve. “Chaque annĂ©e, pendant la fĂȘte, nous allons Ă la pagode pour connaĂźtre notre avenir. Si on tire le papier correspondant Ă la pĂ©riode de “Thassaphone”, notre avenir sera excellent. Il sâagit de la pĂ©riode oĂč Mme Phoutsady, mĂšre de Phavet reçoit la bĂ©nĂ©diction de Pha Inh (dieu du paradis)” a expliquĂ© le vĂ©nĂ©rable de la pagode de HoumbĂšng, dans lâarrondissement de Naxaythong Ă Vientiane.
 Le sermon parle du dĂ©part du Phavet du palais royal de la municipalitĂ© de la ville de Kabinlaphat, oĂč son pĂšre Ă©tait roi. Selon le sermon, la vie du PhaVet comprend treize pĂ©riode distinctes, depuis son dĂ©part du palais, jusquâĂ son retour. Les treizes pĂ©riodes de PhaVet sont Thassaphone, Himaphane, Thanakhanh, Vannaphavet, Jusaka, Choulaphon, Mahaphon, Koumane, Matthy, Sackaty, Maharath, Sackabanh et Nakhone.
Chaque pĂ©riode correspond aux quĂȘtes que Phavet a dĂ» accomplir dans le but de devenir un Sapphangnou, (Bouddha, qui peut lire les Ă©vĂšnements du passĂ© et aussi prĂ©dire lâavenir).Â
DĂšs lâaube du premier jour, les villageois se rassemblent dans leur pagode, au son du tambour, et apportent les offrandes pour le repas matinal des bonzes.Â
Les participants offrent en gĂ©nĂ©ral une noix de coco dont la partie infĂ©rieure est taillĂ©e en un cĂŽne surmontĂ© dâun cierge en cire dâabeille, duquel sont suspendus des billets de banque, des cahiers, des feuilles de papier, des crayons, des mouchoirs, tout objet usuel, des fruits, des gĂąteaux et encore bien dâautres choses.Â
La veille de la fĂȘte, les villageois prĂ©parent surtout des plats de viande, de poissons et le traditionnel “Khao Poune”, pour accueillir les visiteurs.
Pendant le rĂ©cit pour marquer leur respect aux textes sacrĂ©s les fidĂšles attentifs aspergent lâassistance de grains de riz grillĂ© khao tok tĂȘk lorsquâils identifient un khatha (stance versifiĂ©e Ă laquelle les Lao accordent une grande puissance magique) ou un passage de lâhistoire quâils aiment particuliĂšrement.
Cette lecture est scandĂ©e, Ă intervalles rĂ©guliers, de coups de gongs accompagnĂ©s de jets de riz Ă©clatĂ© vers la chaire, imitĂ© par tous les autres, pendant que lâun des hommes frappe le gong de quelques coups de maillet.
Cette lecture rituelle se fait de la façon suivante : le livre sacrĂ© a Ă©tĂ© divisĂ© en chapitres dont la lecture a Ă©tĂ© rĂ©partie entre les diffĂ©rents monastĂšres et, en ce qui concerne ceux confiĂ©s au Vat invitant, la part la plus importante est rĂ©partie entre les diffĂ©rents bonzes. Le moine chargĂ© de la lecture dâun chapitre monte en chaire avant que son prĂ©dĂ©cesseur ait terminĂ©, de façon Ă enchaĂźner immĂ©diatement et ne pas laisser de temps mort : il faut en effet que la lecture soit ininterrompue.
Le religieux qui a terminĂ© sa lecture reçoit, au pied de lâescalier dâaccĂšs Ă la chaire, un cornet de feuilles de bananier contenant des baguettes dâencens, des fleurs et une somme dâargent dans une enveloppe. Cette offrande est le kan lamMaha VĂ©t (offrande pour le chant Maha VĂ©t), rĂ©sultant dâune quĂȘte faite quelques jours plus tĂŽt dans le village, et est la mĂȘme pour tous les moines lecteurs. Il reçoit Ă©galement un autre cadeau de remerciement pour la lecture faite, mais individualisĂ© en quelque sorte : ce kan est offert par le notable qui a tirĂ© au sort le chapitre qui vient dâĂȘtre lu ; montant et la forme sous laquelle il est prĂ©sentĂ© dĂ©pendant de la gĂ©nĂ©rositĂ© et de lâingĂ©niositĂ© du donateur.
Au cours du deuxiĂšme jour, les rĂ©cits continuent et dâautre sĂ©rie dâoffrandes ont lieu et principalement le “Kanlone” (offrande surprise). Des groupes de jeunes gens, dont certains revĂȘtent des accoutrements grotesques, y compris dâhabits de femmes ou de maquillages, circulent Ă travers le village en formant un cortĂšge appelĂ© HĂ© khao phanh kone(procession du riz en mille morceaux) car du riz gluant est offert par un grand nombre de personnes. Lâhoraire pour la formation de cette procession nâest pas dĂ©terminĂ© car il arrive quâelle se prĂ©pare vers 2 ou 3 heures du matin.
Le cortĂšge dĂ©ambule avec un phasat (construction faite le matin mĂȘme Ă lâaide de morceaux de troncs de bananiers, de bambou, de fleurs, de feuilles et Ă©pouse une forme animale plus ou moins imaginaire …) Divers objets, fruits et sucreries, accompagnent Ă©galement le phasat avec les billets de banque attachĂ©s Ă des baguettes plantĂ©es.
Les participants du cortĂšge sâavancent en dansant, chantant, accompagnĂ©s de tambours, Le groupe dĂ©ambule Ă travers le village en chantant et en mimant des chansons souvent trĂšs lestes avec accompagnement dâun tambour, de khĂšne (la flutte) et de gongs. On sâarrĂȘte devant chaque maison Ă travers tout le village dâoĂč on espĂšre soutirer une obole, puis arrivĂ© dans la pagode, elle fait trois fois le tour du bĂątiment âSalaâ donnant lieu aux rĂ©citations.
Câest le bonze qui lit en chaire au moment de lâentrĂ©e de ce cortĂšge de carnaval sur le terre-plein de la pagode qui recevra lâoffrande du phasat. A sa descente de chaire, le moine est portĂ© ââ en triompheââ autour du Sala et recoit le kan Lone du haut de lâescalier du sanctuaire, dâoĂč il donne au cortĂšge une longue priĂšre de bĂ©nĂ©diction. La rumeur lointaine fait Ă©tat dâune procession qui viendrait distraire lâattention des fidĂšles du lecteur lui-mĂȘme. La lecture continue et durera jusquâĂ huit heures du soir et se terminera par un sermont Ă©numĂ©rant la quantitĂ© de mĂ©rites acquis par quiconque a assistĂ© au ThĂ©t Pha VĂ©t .
Le troisiĂšme jour au matin, les fidĂšles participent Ă la cĂ©rĂ©monie de “Tak Bat” Ă la pagode. LâaprĂšs-midi, une nouvelle procession est organisĂ©e. Les participants munis de gongs, de cymbales et de tambours passent de maisons en maisons pour rĂ©colter les derniĂšres offrandes, quâils remettront aux bonzes Ă la pagode.
 Présentation de G. CHEVREUX
( Article paru en août 1974 dans PHILAO n° 14)
Source : Phong Thammavongsa
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